• Bruits de marteau, d'eau qui part en vapeur, de scie et de ciseaux, odeurs piquantes du bois et du fer chauffés à l'extrême, entêtantes de l'huile de lin mêlée à l'essence de térébenthine... La Tour du Bost se fait une beauté en ce moment, avec les finitions du niveau 4.

    Niveau 4 : une porte médiévale

    Depuis la reprise des travaux, toute l'équipe s'est attelée à la confection des portes : trois, en chêne, sont en cours de fabrication ; les volets intérieurs suivront. Elles vont venir fermer l'accès à la salle depuis l'escalier, l'accès à une petite pièce attenante et l'ouverture qui donne aujourd'hui sur le vide (voir Coup d’œil : Chambre avec vue ? - la solution ).

    Niveau 4 : une porte médiévalePenchons-nous aujourd'hui sur cette dernière porte, donnant côté est. Son installation est compliquée par le fait qu'il faut la positionner telle qu'elle l'était autrefois, c'est-à-dire à l'extérieur du monument. Avant de se lancer, il a fallu réaliser le gabarit, pour que le battant ne dépasse pas des murs et qu'il corresponde parfaitement aux traces laissées dans le bâti. Puis on a pu assembler les planches, pour obtenir une porte cloutée à bois croisé : un travail plus difficile qu'il ne paraît. En effet, il faut conjuguer d'une part la pose des clous (forgés tout exprès par M. Jacquelin), nécessitant une pose en losange avec un pas compris entre 10 et 14 cm, avec le fait que les planches verticales ne sont pas toutes de la même largeur : il s'agit de ne pas "tomber", lors de la pose d'un clou, sur un espace entre deux planches !

     

    Niveau 4 : une porte médiévale"Au Moyen-Âge, précise Gauthier Jacquelin, ferronnier d'art, on ne s'embarrasse pas de notion de style. Ce qui fait "style", c'est l'efficacité, surtout dans l'architecture militaire. Tout a une fonction, rien n'est superflu".  

    La pose des clous par exemple ne se fait pas au hasard : ils sont toujours cloués sur les planches horizontales, les pointes étant recourbées à chaud et rentrées dans les planches verticales. Normalement, les têtes et les parties horizontales du bois font face à l'extérieur des bâtiments, pour des raisons défensives : il est plus difficile de défoncer une porte armées des têtes de clous qu'une autre où n'apparaissent que les tiges.

     

    Le cas de notre porte ouvrant sur l'orient est particulier, puisqu'elle apparaîtra aux visiteurs en quelque sorte "inversée". En raison du dispositif mis en place au XVIe siècle, lorsque la porte ouvrait sur un bâtiment aujourd'hui disparu, de l'intérieur de la tour nous aurons vue sur la face portant les têtes de clous. Un choix qui n'a rien à voir avec des raisons esthétiques : si l'on se remet dans l'esprit de l'époque,  la pièce (une chapelle?) qui existait alors était la dernière possibilité de repli en cas d'attaque : il fallait donc prévoir un système de défense.  À l'intérieur de la tour, nous sommes encore à l'extérieur de la dernière position de repli.

    Niveau 4 : une porte médiévale

     

    Niveau 4 : une porte médiévaleLa manière de procéder pour équiper la porte de ses clous est assez simple, mais nécessite deux personnes et une certaine souplesse d'au moins un des intervenants. Posée à l'horizontale sur des tréteaux, la porte est fortement maintenue assemblée avec des serre-joints. Les endroits où les clous vont être enfoncés sont repérés. Les clous, chauffés à blanc sur la forge portative, sont amenés à leur emplacement ; ils s'y enfoncent comme dans du beurre - un coup de marteau, et les voilà en place. Tandis que l'un (celui qui tient le marteau) refroidit la tête du clou et le bois avec de l'eau puis maintient le clou en place en appuyant dessus fortement, l'autre se glisse prestement sous la porte, tord à la pince la tige encore chaude et l'enfonce dans le bois  en quelques coups de marteaux. Nouveau refroidissement, de la tige cette fois, avec un peu d'eau, et le tour est joué.

    Niveau 4 : une porte médiévale

     

    Pour retrouver les travaux du niveau 4, consultez nos articles de la rubrique "Travaux", et tout spécialement ceux qui suivent, qui vous donnent en outre accès à d'autres liens :
     
    Une histoire de poutre (1) : Casse-tête chinois
    Niveau 4 : un plafond très technique (1)
    C'est reparti !  

     

     

    Des photos de la poutre du niveau 4 - et sur le plafond de la nouvelle salle, ainsi que sur les scellements au plomb.

     


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  • Murielle est arrivée à la Tour du Bost en avril dernier, pour un contrat de six mois avec Tremplin Homme et Patrimoine. Cette Blanzynoise fait en ce moment un stage en immersion de quinze jours en horticulture, au GAEC des Engoulevents (spécialisé dans les plantes vivaces et annuelles), situé au pied du monument.

    Murielle : de la Tour aux plantes

    Quel est le but de ce stage ?
     
    Un stage en immersion permet de se rendre compte du métier qu'on envisage, avant de passer à la formation, pour être sûr que c'est bien ça qu'on veut faire.
     
    Avant de commencer le contrat avec Tremplin, aviez-vous déjà une idée de ce que vous vouliez faire ensuite ?
     
    Oh oui, je voulais de toute façon aller vers l'horticulture ! Mon idée était déjà faite. Tremplin, c'est pour me donner un coup de main, en fait, pour m'aider à concrétiser mon projet.
     
    Qu'est-ce qui, jusqu'à Tremplin, vous en avait empêchée ?
     
    C'était un problème de déplacement, de permis de conduire : c'est très cher ! Ça a toujours été ça, mon problème. Grâce au contrat avec Tremplin, Pôle Emploi me donne un coup de pouce pour mon permis. Ensuite, on verra pour la formation en horticulture – j'aimerais bien que ce soit à Saint-Marcel, ce n'est pas trop loin. Avant, j'ai travaillé dans un domaine qui n'a rien à voir : j'étais agent cynophile de sécurité – "maître-chien". J'aime les chiens – mon but, c'était de travailler avec eux... J'ai arrêté parce qu'en fait, je n'ai pas le gabarit ! Et puis c'est un métier très misogyne. On ne peut pas faire confiance aux gens, non plus, il faut toujours suspecter tout le monde : dans un magasin, n'importe qui peut être un voleur... C'est spécial, comme métier.
     
    Aviez-vous une idée précise de ce qu'était l'horticulture, avant ce stage ?
     
    Oui, chez moi je fais déjà plein de choses : j'ai un grand jardin, avec des légumes, des fleurs, des fruits, il y a de tout ! Je savais où j'arrivais avant de commencer ici. J'aime les plantes, la nature, l'extérieur – ne pas rester enfermée tout le temps...

    Murielle : de la Tour aux plantes

     

    Connaissiez-vous la Tour du Bost avant d'y travailler ?
     
    Je l'avais déjà vue de loin, souvent, depuis la route. La première fois que j'y suis venue, avec le chantier, je me suis dit que c'était quand même vachement grand et que ça avait l'air de ne pas être facile, comme boulot ! Et puis on s'habitue...  
     

    Le fait d'être une femme dans un chantier de bâtiment ne vous a pas fait peur ?
     
    Ici, c'est totalement différent du milieu des maîtres-chiens. Ce n'est pas du tout la même mentalité. Ce n'est pas misogyne, au contraire. Cela ne me dérange pas du tout de forcer un peu, physiquement. Il y a toujours quelqu'un qui va m'aider quand il y a des choses vraiment lourdes. L'ambiance de travail est bonne, on s'entend bien, il n'y a pas de disputes... Quand j'étais en formation cynophile, au contraire, comme j'étais une fille, c'était moi qui prenais le plus ! Cela n'avait vraiment rien à voir.

    Murielle : de la Tour aux plantes

     

     

    Qu'avez-vous trouvé de plus difficile pour le moment à la tour, et de plus agréable ?
     
    C'est bizarre, mais aux deux questions, je répondrai : les enduits ! C'est très difficile à faire, mais quand on a trouvé le coup de main, c'est vraiment bien ! Quand on a fini, on se dit : "quand même, c'est vachement joli ce que j'ai fait !"


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  • Coup d'oeil : Chambre avec vue ? (la solution)

     

     

     

    Ces jours-ci, a "poussé" sur la façade est de la Tour du Bost une étrange protubérance : un balcon pour la "chambre des dames", au niveau 4... 

     

     

     

     

    Coup d'oeil : Chambre avec vue ? (la solution)

     

    Il s'agit en fait d'une installation très astucieuse qui a germé dans le cerveau fertile du ferronnier d'art Gauthier Jacquelin. Astucieuse, car, sans abîmer du tout l'édifice, elle permet une intervention délicate : fermer cette dangereuse ouverture sur le vide, juste au-dessus de la maison d'accueil. Un vrai défi technique ! Cette structure pour échafaudage en porte-à-faux, composé d'une ossature tubulaire, réalisée sur-mesure, vient prendre appui sur des éléments existants (rebords, trous) pour assurer une stabilité et une sécurité parfaites.

     

     

    Sur ce mur situé à l'est, au niveau 4, ouvrait à l'origine une fenêtre à meneaux "classique", semblable aux autres fenêtres avec coussièges du donjon. Elle fut remaniée et transformée de façon très importante (au XVIe siècle probablement), devenant une porte surmontée d'une petite fenêtre. Elle permettait à l'époque d'accéder à un bâtiment accolé au donjon, à l'emplacement occupé actuellement par la maison d'accueil, mais bien plus haut. À cet étage devait se situer une chapelle.

    Coup d'oeil : Chambre avec vue ? (la solution)

    La fenêtre à meneaux du XIVe à gauche, modifiée au XVIe à droite
    (dessins de Frédéric Didier, Architecte en Chef des Monuments Historiques)

    En ouvrant ce printemps le mur qui condamnait cet accès, nous avons retrouvé les traces des gonds, à l'extérieur de la tour : la porte se situait donc du côté du bâtiment qui a disparu. "C'étaient des gonds tardifs, du XVIe-XVIIe siècle maximum, plutôt XVIe, scellés probablement au châtaignier", explique M. Jacquelin.
     
    Et voilà : point de délurée damoiselle hélas (on aimerait bien retrouver ce genre d'archives !), ni d'escalier mobile (la tour en était dotée en effet, mais à un tout autre endroit - moins haut), ni (gros soupir de frustration) de tyroliennes fantastiques, qui auraient pourtant pu être agrémentée d'un piment particulier, celui de frôler les cornes des bovins qui paissent dans les prés...
     
    Pour retrouver le travail de Gauthier Jacquelin dans la Tour du Bost :
    Gauthier Jacquelin : l'art de la fusion

     


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  • Cet été, pour la deuxième fois, Michelle Vailleau a exposé ses réalisations en vannerie à la Tour du Bost. Cette enseignante, aujourd'hui retraitée, a infléchi son cap professionnel il y a onze ans : elle a suivi un an de formation à l'école nationale de vannerie de Fayl Billot, en Haute-Marne, avant de travailler à mi-temps, enseignante et vannière.

    Michelle Vailleau, vannière : création et re-création

    Ce doit être intéressant de continuer à faire vivre quelque chose, comme la vannerie, qui existait déjà il y a des siècles ?
     
    C'est vrai que c'est un artisanat primitif, utilisé depuis il y a très, très longtemps. On a retrouvé dans les fouilles des poteries qui portaient des marques de tissage d'osier : la poterie avait donc été moulée dans un contenant en osier pour lui donner sa forme. On a certainement vite découvert que l'osier était résistant, léger, et surtout tellement souple qu'on peut lui donner plein de formes différentes. On peut le travailler directement, ou bien le faire sécher : en le mouillant ensuite, on retrouve sa souplesse d'origine.
     
    Avez-vous développé une technique différente depuis l'année dernière ?
     
    Non. Les techniques elles-mêmes ne bougent pas tellement, on les adapte plutôt à de nouveaux modèles. C'est vrai que j'ai repris des choses un peu moins traditionnelles : des formes ovales, des choses un peu hautes... Ce qui très traditionnel, dans ce que je fais, ce sont les petits paniers ronds, les corbeilles, les paniers à bûches, les paniers de pique-nique... Après, on adapte : on peu très bien faire des luminaires, à partir d'une structure métallique. Pour faire certains de mes paniers, par exemple, je suis partie des bannetons de boulanger : j'ai rétréci un petit peu leur forme et j'ai adapté une anse. Il m'arrive de m'inspirer d'objets en vannerie que je rencontre au fil de mes déplacements, mais certains sortent tout droit de mon imagination, comme les paniers en forme de gouttes. On peut varier les formes à l'infini, mais on en revient souvent aux paniers traditionnels, avec ou sans couvercle.
     
    Travaillez-vous avec un osier particulier ?
     
    Déjà, je ne travaille que l'osier. Il y en a deux sortes : le blanc, qui n'a plus d'écorce, et le coloré qui l'a gardée. Les différences de couleurs viennent des variétés d'osier. Autrefois, on trouvait pas mal d'osier dans les bouchures : les cultivateurs les laissaient pour tresser leurs paniers l'hiver. Il y en avait aussi dans les bouts de rangs des vignes, dans les régions viticoles : on utilisait des brins d'osier, fendus, pour attacher les vignes. Mais en fait, la terre de la région ne convient pas vraiment à la pousse de l'osier, il faut un terrain bien gras et humide. Moi, je vais le chercher en Haute-Marne, parce que c'est là-bas que j'ai fait ma formation, à Fayl Billot. C'est vraiment la capitale de la vannerie, il y a beaucoup de vanniers et d'osiériculteurs. L'osier y est calibré, trié par taille, grosseur, qualité, couleur...
     
    Connaissiez-vous la Tour du Bost avant d'y exposer pour la première fois, l'année dernière ?
     
    Je suis Creusotine d'origine et mon père m'emmenait beaucoup dans des endroits comme Charmoy pour cueillir des champignons. J'ai vu la tour pour la première fois il y a très longtemps, en passant sur la route, quand elle était encore à moitié démolie. Ensuite, quand j'ai connu le GAEC des Engoulevents, situé au pied de la Tour du Bost, je venais y acheter des fleurs et de là, on la voit encore mieux. Une façon de s'en approcher un peu plus ! Ce n'est que l'année dernière, pour ma première exposition, que j'y suis enfin entrée. C'est une belle réalisation ! J'ai fait un peu de pub cette année auprès d'amis, en leur conseillant de venir voir d'une part les expos mais aussi la restauration, parce c'est quelque chose de fabuleux... C'est vraiment colossal ! Ces plafonds, cette cheminée, c'est impressionnant ! C'est une bonne idée de la rendre au public au travers des visites et des expositions, parce que les gens ne la connaissent pas assez

     

    Michelle Vailleau a exposé ses créations à la Tour du Bost : retrouvez les photos de nos ouvertures estivales.

     


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