• Une histoire de poutre (6) : Un travail de longue haleine

    Jacky et Sylvain Desbois sont charpentiers-menuisiers à Charmoy : ils sont associés depuis 2005. Leur entreprise artisanale est familiale, avec deux salariés : ils sont la cinquième génération à travailler le bois, toujours dans cette commune. Leur arrière-grand-père, leur grand-père et leur père étaient charrons (fabrication de roues de char et de remorques en bois pour l'agriculture). Leur père a laissé le charronnage, avec l'avènement de l'automobile et les révolutions mécaniques agricoles, pour se reconvertir dans la menuiserie-charpente, après avoir fait une incursion en carrosserie "bois" automobile. Avant de s'associer, les deux frères travaillaient déjà ensemble : Sylvain avait d'abord repris l'entreprise de leur père en 94, Jacky y étant salarié. Ils ont choisi de s'équiper ces temps-ci d'un matériel assez innovant, pour fabriquer des portes et des fenêtres répondant aux nouvelles normes d'isolation (épaisseur du vitrage et du bois) - cela représente 25 à 40 % de leur activité, suivant les années.

    Une histoire de poutre (6) : Un travail de longue haleine

    Ce sont eux qui se sont chargés de préparer la poutre du deuxième étage et ses aisseliers. Ils ont également été très présents pendant la pose, Sylvain en haut de l'échafaudage extérieur, faisant l'interface entre le grutier et le reste de l'équipe, Jacky à l'intérieur avec les membres du chantier d'insertion et de l'association.

    Une histoire de poutre (6) : Un travail de longue haleineJacky : La pose de cette poutre a été pour nous très enrichissante : c'était la première fois que nous mettions en œuvre un ouvrage aussi gros, aussi imposant, aussi massif ! C'est moi qui ai fait la part de fabrication à l'atelier, ça a été une expérience unique : réaliser des assemblages aussi importants, ça se fait rarement, voire jamais... Il faut réfléchir. On commence par tourner autour des pièces de bois, puis on se met à l’œuvre, on ébauche, on fait une approche... et on y va !

    Une histoire de poutre (6) : Un travail de longue haleineSylvain : Nous avons fait toute la taille de la poutre en atelier, ainsi que la préparation des aisseliers. C'est à partir des plans de M. Didier, Architecte en Chef des Monuments Historiques, que nous avons travaillé. Nous avons fait un chantournement en bas des aisseliers, sur la face inférieure, pour créer la partie arrondie, avec des chanfreins (petits plats évitant d'avoir une arête vive). Il s'agit d'un travail que nous avons l'habitude de faire, même si ce n'est pas avec des pièces aussi grosses : un système de doubles tenons-mortaises avec un chevillage à tires (chevilles en bois).
     
    Jacky : Il y avait des difficultés de manutention, vu la taille des pièces. L'autre problème, c'est qu'on ne trouve aucun outillage, aujourd'hui, capable de réaliser de telles ébauches ! Il faut donc tout faire à la main, ce qui a impliqué du tracé, des épures et un temps de main d'oeuvre assez conséquent : j'y ai passé au moins dix jours, plus des aides ponctuelles du personnel. C'était un travail de longue haleine !
     
    Vous avez aussi participé à la réflexion autour de "comment faire passer la poutre" ?
     
    Sylvain : Oui, et nous avons ensuite participé à toute la partie levage et mise en place. Nous avons aussi fourni des sangles de levage, des crics, des étais - enfin, une partie du matériel nécessaire.

    Une histoire de poutre (6) : Un travail de longue haleineJacky : L'architecte a dû faire des plans, les membres de l'association "La Tour du Bost" nous ont présenté leur façon de voir les choses, ainsi que l'objectif à atteindre. Nous leur avons donné les moyens que nous avions pour la mise en œuvre ; bref, nous nous sommes concertés. Il y avait une part de risque, comme dans tout chantier de ce type. L'objectif premier était, surtout, de ne pas avoir d'accident. Ensuite, pour la pose de la poutre,  on sait où on veut arriver mais ce n'est pas mathématique, il faut trouver les moyens d'y parvenir.
     
    J'imagine que vous étiez vraiment dans le feu de l'action, mais vu de l'extérieur, lorsque la poutre est arrivée, c'était vraiment impressionnant !
     
    Sylvain : Oui, c'est vrai. Nous avions quand même bien préparé la pose, il y avait eu une grosse réflexion en amont. À aucun moment, je n'ai été surpris par la tournure des événements. Si Tremplin était un peu juste en matériel, tout le reste s'est déroulé normalement. L'équipe de ce chantier-là est pleine de bons éléments.
     
    Actuellement, l'entreprise Desbois travaille sur la charpente de la chapelle du Château de Couches : elle y intervient sur des pièces de bois qui datent des XI-XIIes siècles.
     
    Les précédents épisodes ?
    Une histoire de poutre (1) : Casse-tête chinois
    Une histoire de poutre (2) : petit retour en 2006
    Une histoire de poutre (3) : le chêne providentiel
    Une histoire de poutre (4) : Tous sur le pont !
    Une histoire de poutre (5) : Attention, la voilà !
    La suite ?
    Une histoire de poutre (7) : un élan collectif
     
    Des photos ?

     

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