• Et voilà, c'est parti ! Depuis ce dimanche, la Tour du Bost a pris son allure de croisière estivale. Une occasion de visiter les lieux et de constater l'évolution des travaux, depuis l'année précédente - ou depuis cinquante ans, comme certains de nos visiteurs qui n'en reviennent pas du changement ! Une occasion aussi de voir les expositions artistiques et artisanales (nous nous pencherons sur elles un peu plus tard).

    C'est aussi, pour nous, l'occasion de retrouver des personnes qui ont participé à la sauvegarde du monument.

    Sébastien : dix ans après

     

    Sébastien Schaffer, par exemple. Pendant six mois, de juin à décembre 2001, il a fait partie du chantier d'insertion de Tremplin qui œuvrait au déblaiement de la cave et au jointoiement des voûtes, à la remise en état des corniches du sommet, à la rénovation de la maison d'accueil – et à la création du site internet de la Tour du Bost. Aujourd'hui, il travaille comme cuisinier au lycée Julien Wittner à Charolles.  

     Certains endroits lui sont pays de connaissance (les voûtes du niveau 2, la citerne et sa source, le chemin de ronde...), mais les lieux ont tellement changé qu'il ouvre de grands yeux. Quant aux salles des niveaux 3 et 4, il n'avait même pas imaginé, à l'époque,  leur aspect « final » : elles n'étaient encore que partie intégrante du grand trou intérieur du donjon ! Arrivé au niveau 5, d'ailleurs, d'où aucun plancher ne vient fermer la vue sur le dernier niveau, il retrouve une partie de la tour d'autrefois. Il apprécie, en connaisseur, le travail effectué au fil des ans.

     

     

    À la fin de la visite, il ne cache ni son étonnement, ni son plaisir : "Je suis content d'être revenu, ça vaut le coup ! Je n'aurais jamais cru que ça ressemblerait à ça un jour ! C'est impressionnant, vraiment du beau boulot. Lorsque j'y étais, les conditions de travail étaient bien différentes : nous n'avions pas la maison d'accueil, mais seulement une cabane – et certainement pas de vestiaires « au chaud » comme maintenant ! L'hiver, il nous est arrivé de faire griller des marrons au sommet de la tour, pour nous réchauffer les doigts ; comme on travaillait sur le chemin de ronde, malgré le toit de l'échafaudage, on se prenait la pluie... Du bas, on voyait encore le haut de la tour, les planchers intérieurs n'avaient pas encore été remontés."

    Comment voit-il son passage ici, à dix ans de distance ? "J'ai participé à l'atelier parce que j'avais besoin d'un boulot. C'était une bonne expérience, l'ambiance et l'équipe étaient sympas. J'y ai aussi appris des techniques du bâtiment : cette restauration, c'est autre chose que de superposer des moellons..."
     
    Vous souhaitez retrouver les journaux des chantiers d'insertion ? Ils sont ici, sur le site de la Tour du Bost.


    votre commentaire
  • La Tour du Bost, ce n'est pas seulement de la pierre et de la maçonnerie, soutenues et accompagnées de poutres, de planchers et d'huisseries diverses. Le métal y a sa place aussi, de diverses façons, depuis les serrures et les gonds jusqu'aux barreaux des fenêtres. Voilà plusieurs années qu'un ferronnier d'art, Gauthier Jacquelin, intervient régulièrement sur le site, faisant passer son savoir-faire aux ouvriers, au fil des chantiers. Lions connaissance avec ce passionné volubile et savant, qui aime à retrouver, dans les murs de la tour, l'écho des ouvriers d'autrefois. Un artiste de la fusion entre métaux et histoire, entre hommes et techniques d'hier et d'aujourd'hui. 

    Gauthier jacquelin : l'art de la fusion

    Depuis quand travaillez-vous à la restauration de la Tour du Bost ?
     
    J'y viens depuis de longues années déjà, au début pour de petits travaux de dépannage ou des interventions urgentes. Je travaille depuis trois ans environ sur le chantiers de l'association Tremplin, à la restauration du patrimoine en fer forgé. La première fois que je suis intervenu, c'était ici : il s'agissait de fermer la tour (qui n'avait jamais eu de porte) pour des raisons de sécurité.
     
    Quelle est la spécificité de votre travail ?
     
    Je fais de la restauration, pas de la rénovation : on n'est pas dans le "simili", il faut être puriste au maximum, coller au plus près à la réalité. Le but d'une restauration proche de la condition de fabrication, c'est entre autres de retrouver les techniques anciennes. Je réutilise les matériaux d'origine le plus souvent possible. Si cela m'évite d'acheter de la matière, cela m'oblige à passer plus de temps sur chaque chose ; mais le résultat final est beaucoup plus sympa que si je trichais en prenant par exemple une barre neuve et en la vieillissant – pour "faire vieux", comme on dit. Je serais complètement à côté de l'esprit de restauration. On peut faire du neuf avec du vieux, mais on ne fait pas du vieux avec du neuf.
     
    Découvrir des techniques anciennes, se demander comment les gens ont pu faire avec le peu de moyens qu'ils avaient... On se réapproprie leur façon de faire, on fait parler les ouvriers qui ont bâti la tour. C'est hyper enrichissant, parce qu'on s'aperçoit qu'ils étaient performants ! À l'époque, par exemple, on allait plus vite pour percer un trou que maintenant. Cela tient à la technique : au lieu de percer des trous de plus en plus gros, jusqu'à 30 par exemple, on utilisait directement un foret de 30, plat, avec un petit téton au bout. On faisait un petit trou et on perçait directement au diamètre voulu sans que ça chauffe le foret, en allant lentement. Les ouvriers avaient des systèmes de presse, avec une vis sans fin : ils mettaient leur vilebrequin dedans et serraient la vis, ce qui apportait une pression. Même dans la pierre. ça allait plus vite qu'avec un de nos perforateurs d'aujourd'hui !
     
    Je fais aussi des recherches, notamment à la bibliothèque du musée de Cluny à Paris, où se trouvent beaucoup d'archives. Il faut bien sûr faire le distinguo entre les archives colportées par Viollet-le-Duc, dans lesquelles il y a des choses à trier, et des archives plus sérieuses, mais j'ai un grand respect pour Viollet-le-Duc : c'est quand même grâce à lui qu'on s'est intéressé au Moyen-Âge ! Il vivait à une période favorable en France, sous Napoléon III, et on avait beaucoup plus de moyens qu'aujourd'hui... Cela a permis l'ouverture de recherches par la suite. J'espère que dans un siècle on dira aussi de mon travail : "Ouais, c'est bien, mais il aurait dû faire comme ci ou comme ça" ; l'histoire avance, et les découvertes historiques aussi.
     
    Vous semblez heureux de travailler ici...
     
    Je me considère comme un "presque voisin". Enfant, j'habitais à Montcenis. Je voyais la tour depuis chez moi. J'avais des contacts amicaux avec la famille qui la possède : du coup, je venais la visiter (on en avait l'autorisation en faisant bien attention). Nous, ça nous fendait le cœur de la voir tomber, cette tour ! Sans arrêt, on entendait parler de blocs qui en dégringolaient... Et finalement, des années et des années plus tard, elle est toujours là, en pleine restauration !


    votre commentaire
  • Bernard Morin est un ancien professeur de Sciences de l'Ingénieur et d'Informatique  au lycée Henri Parriat à Montceau-les-Mines. Il a rejoint la réflexion autour de la pose de la poutre du 2e étage lorsque son arrivée prochaine fut annoncée et a participé activement à sa pose, en compagnie de son frère. Il s'est notamment chargé, en amont, des calculs (inclinaison de la poutre, répartition des charges, forces...).

    Nous lui avons demandé comment il s'était laissé "prendre" par la Tour du Bost. 

    Bernard : l'atrait des défis techniquesEn fait, je venais parfois à la tour en visiteur. Puis j'ai pris ma retraite (en même temps que Robert Chevrot, un ancien collègue) et à partir de ce moment-là, j'ai été beaucoup plus disponible. Évidemment, des problèmes techniques se posaient régulièrement sur le chantier : il était assez naturel que Robert me pose des questions, à cause de mon boulot, au lycée.
    Un jour, Robert m'a téléphoné : il avait lu dans ses vieux grimoires comment était constituée  une fenêtre. Il en avait les dimensions extérieures et m'a dit qu'il faudrait regarder comment agencer les pierres. Je ne comprenais rien à ses explications orales et j'aurais préféré un croquis ; il m'a répondu que justement, il n'arrivait pas à en faire un ! Je lui ai donc conseillé d'utiliser de la pâte à modeler et de m'expliquer ce qu'il faisait, parce que je n'arrivais pas à suivre son raisonnement.

    Bernard Morin (à droite)
    avec Robert Chevrot

    Tout en modelant la pâte, j'enregistrais les explications : ça ne ressemblait à rien du tout, mais c'était extrêmement intéressant comme idée. En utilisant un logiciel de modélisation, je lui ai fait une proposition - à partir du moment où chaque pierre est modélisée, c'est assez facile de changer cotes et position. Robert est passé et nous avons vérifié si nos éléments concordaient. Il a fallu apporter des modifications, presque immédiatement, ce qui m'a permis de voir ce qu'il avait en tête. Ensuite, nous avons sorti les plans.

    Bernard : l'atrait des défis techniquesMais cela ne suffisait pas : il fallait la véritable maquette de la meurtrière, que les membres du chantier d'insertion ont réalisée en béton cellulaire, en grandeur réelle, en visualisant bien la "chose" grâce à la démarche antérieure.
     
    Grâce à cette maquette, nous savons maintenant qu'il reste des modifications à apporter. Nous n'avons pas vu certaines choses sur le modèle, même en le retournant dans tous les sens : il faut pouvoir manipuler les pièces... A certains endroits, nous avons prévu de grosses pierres, alors qu'on peut se permettre d'en mettre deux petites (c'était quand même ça l'idée : essayer de faire au plus simple avec les matériaux qu'on a). A d'autres endroits, si on ne veut pas que ça lâche, on a intérêt à mettre une grosse pierre...
     
    Toute cette démarche est passionnante : Robert avec son grimoire, la pâte à modeler, le modèle informatique et ensuite, les plans puis la mise en œuvre concrète ! Ce qui m'intéresse, ce sont les défis techniques. La Tour m'offre des problèmes nouveaux, des vrais, des concrets. J'aime aussi comprendre comment les améliorations techniques ont émergé : elles ne viennent jamais de rien, ce sont des adaptations de choses antérieures. Comprendre comment les gens autrefois, compte tenu de leurs connaissances techniques etc, ont fait pour augmenter ce savoir, trouver de nouvelles possibilités... C'est au Moyen-Age que s'est mise en place notre façon de théoriser. Avant, on travaillait de telle ou telle manière "simplement" par habitude, par transmission orale, par savoir-faire ; mais à la fin du Moyen-Age, on a commencé à noter et à développer des théories, comme  plus tard Léonard de Vinci dans ses carnets.
     
    Voilà ce qui m'attire sur ce chantier.
     
    Et puis, elle est magnifique, cette tour : il faut qu'on la fasse parler !
     
    À propos de la maquette, vous pouvez consulter la Lettre d'information du chantier d'insertion de décembre 2009, mise en ligne sur le site de la Tour du Bost.


    votre commentaire
  • Justin est l'un de nos deux guides tout neufs de l'été dernier. Élève cette année en Terminale littéraire à Montceau-les-Mines, il voudrait commencer en septembre un "BTS d'animation et gestion touristique locale" ou une licence d'histoire. Son but : devenir soit animateur du patrimoine, soit organisateur d'événements touristiques. Petit retour sur son expérience de guide...

    Justin : suivez le guide !- Comment as-tu décidé de t'impliquer dans cette fonction de guide à la Tour du Bost ?
    - Robert Chevrot, président de l'association, fait partie de la même troupe de théâtre que moi ; comme je disais ne pas savoir ce que j'allais faire pendant l'été, il m'a parlé de la tour, où il était guide, et m'a proposé de le rejoindre. L'Histoire m'intéresse beaucoup. En plus, je me destine à un métier du tourisme, où le contact avec le public est important : être guide, c'est un élément intéressant sur un CV et une expérience enrichissante. Ce qui m'a attiré, c'est ce mélange des aspects historique et "charismatique" : savoir capter l'attention d'un auditoire et la garder tout en faisant passer l'information.

    - Comment t'es-tu préparé ?
    - En arrivant la première fois, une semaine avant de me lancer, j'ai été impressionné par la taille de la tour, que je n'avais jamais vue ! J'ai suivi une des visites de Robert - et j'ai potassé les documents, ce qui m'a apporté le "contenu". J'ai aussi remarqué que Robert, comme Fabrice (l'autre "nouveau" guide), faisaient beaucoup de gestes en parlant. J'ai essayé d'en faire autant pendant mes visites. Je joue, au théâtre, mais la communication avec le public en tant que guide n'est pas la même. C'était un exercice que je ne connaissais pas ! J'avais peur de ne pas être capable de capter l'attention : ma voix porte moins que celles de Robert et Fabrice, je suis bien plus jeune... Finalement, je me suis adapté aux groupes de visiteurs. En gros, il y en a de deux sortes : ceux qui viennent parce qu'ils sont intéressés par la tour, et ceux qui sont là un peu par hasard (excursion organisée par un tiers, qu'ils n'ont pas voulu refuser, par exemple). Lorsque les gens étaient très attentifs et curieux, je rentrais bien plus dans les détails. Je me souviens notamment de trois messieurs, restés bavarder une fois la visite terminée, qui m'avaient posé beaucoup de questions. C'est passionnant de pouvoir partager comme ça !

    - Avais-tu des endroits favoris, dans la tour ?
    - J'aimais bien raconter les anecdotes liées au sous-sol. En plus, l'endroit met les visiteurs dans une ambiance particulière, avec la descente de l'escalier, l'épaisseur des murs, le confinement, l'eau...

    - Qu'as-tu retiré de cette expérience ?
    - Cela m'a conforté dans mon choix d'études après le bac : j'ai réalisé que j'aimais vraiment expliquer aux gens les aspects historiques etc. Cela m'a permis aussi d'avoir une autre approche du public, d'apprendre à gérer un groupe. J'ai aussi agrandi ma connaissance de l'histoire locale.


    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique